Edouard Borie

La mode, un mot qui raisonne dans toutes les têtes en cette période de soldes. Cette tendance est en perpétuelle évolution, au fil des saisons, des couleurs, et des formes. La mode ne se limite pas seulement au secteur du prêt-à-porter et s’étend aussi à l’art culinaire. Le design culinaire ouvre les appétits et fait travailler les esprits. La métamorphose de l’agroalimentaire.

Le design culinaire est une discipline créée par Marc Bretillot, professeur à l’Ecole supérieure d’art et de design de Reims (ESAD). Cette discipline qui fête ses dix ans, fait appel à deux éléments distincts, la cuisine et le design, choses peu évidentes à mettre en relation quand on imagine d’un côté le designer qui réalise une œuvre sur papier et le cuisinier qui lui de son côté s’attèle aux fourneaux pour préparer son plat. La subtilité va donc être de mêler les deux formes d’art, chacune avec ces contraintes. Il est possible de créer des projets en théorie, qui seront impossibles à  mettre en pratique à cause de la spécificité des produits employés (la liquidité, la densité et la couleur). Par exemple, au contact de l’air, une pomme coupée en fines rondelles aura tendance à s’oxyder rapidement et à se teinter d’une couleur marron-orangée peu appétissante. Ce paramètre ne pouvait pas être envisagé par le designer, seul le chef aurait pu s’en douter.  Le projet restera donc à l’état de projet. Malgré les quelques soucis techniques, il est tout de même possible aujourd’hui de voir des pommes carrées, des huitres au chocolat et de la choucroute sucrée grâce au design culinaire…

« Une création née de ce mariage offre ainsi de nouvelles expériences sollicitant les esprits les plus imaginatifs et les plus joueurs des contemporains que nous sommes. » Marc Bretillot

Le design culinaire est ludique, il fait appel à des thématiques bien spécifiques, « le jeu, le plaisir, l’interactivité,  la surprise, l’imaginaire, le défoulement, la contemplation, l’engagement ou la provocation… ». Il est certain que ces aspects ludiques, doivent éveiller en vous l’envie de consommer. Le consommateur qui est séduit par un de ces aspects sera en clin à acheter le produit.

Je distingue deux formes de design culinaire, la première est la forme publicitaire. Un exemple très simple et qui parle à tous, l’affiche d’un hamburger appétissant, dans lequel aucune feuille de salade ne dépasse et où le steak est parfaitement cuit, vous met l’eau à la bouche et provoque en vous cette sensation de plaisir. Alors que la réalité est bien différente, un hamburger qui ne se tient pas, de la sauce qui coule partout et pour couronner le tout une cuisson carbonisée. Le marketing et son design culinaire de  base a  frappé et re-frappera encore.

Selon moi, le « vrai » design culinaire va plus loin, il doit allier originalité des formes, des goûts et des couleurs et être comestible. Pour parvenir à ce résultat, il faut associer deux champs de compétences, les métiers de bouche d’un côté et les designers de l’autre. Un nouveau type de designer voit le jour, les designers culinaire, ce qui n’existait pas il y a encore quelques années. Au delà d’être une sorte de décoration de nos assiettes, le design culinaire est avant tout une nouvelle façon de travailler des produits, les designers doivent donc apprendre les caractéristiques physiques des produits et les chefs doivent tenter d’adapter les modèles qui leur sont proposés. Un réel compromis doit être réalisé entre les deux partis afin d’obtenir un résultat satisfaisant, à l’œil et au goût. Un bon designer doit prendre en compte l’ergonomie et le goût en bouche.

Une nouvelle tendance qui remporte un franc succès. Il est possible de suivre des cours du soir où vous apprendrez à réaliser quelques plats originaux qui impressionneront vos amis. On peut aujourd’hui se permettre de « jouer avec la nourriture » de temps en temps. Le but du design culinaire est de présenter les classiques de la cuisine sous des formes inattendues, comme des churros originaux (photographie à gauche). C’est le pari de Marc Bretillot, qui nous propose par exemple une gaufre en forme de cornet que l’on peut tenir dans sa main et manger dans la rue, sans se renverser du sucre ou du chocolat sur soi. Cependant, le consommateur doit garder des repères sinon il serait perdu et ne s’intéresserait pas à cette nouvelle idée. Pour pallier à ce problème, il faut par exemple garder un nom évocateur et les principaux ingrédients de la recette originale. Ce sont des bons moyens pour faire adhérer le consommateur à un nouveau concept.

« En cuisine aucun tabou, il faut exploser les codes et démolir les règles traditionnelles » Marc Bretillot

« On ne peut pas faire n’importe quoi juste pour faire joli, les gens aiment avoir des repères. » Flora restauratrice

Des nouveaux postes à pourvoir. Une bonne maîtrise des bases de la cuisine et du design classique est indispensable pour pouvoir prétendre à être designer culinaire. Les plus grands chefs ont tous cette faculté d’innover en eux, mais ils représentent un nombre très restreint de personnes, trop peu face à la demande en pleine expansion, alors c’est certain des opportunités de job vont être à saisir! N’hésitez pas, lancez vous!

Manger avec les yeux c’est bien mais… Seriez vous prêt à payer plus cher pour un produit pas forcément meilleur au goût, mais qui soit un produit design?


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